Le soir tombait sur Kyoto. Cette période de la journée était celle que préférait Akyo : elle lui était propice au rêve. Il en profitait donc pour sortir en douce de l’école d’arts martiaux après avoir accompli ses corvées , comme à son habitude, pour aller admirer la ville qui s’endort. Inconsciemment, ses pas l’avaient mené jusqu’au centre de Kyoto. Son cœur était toujours hanté par la jeune Maiko qu’il avait rencontré il y a peu à la sortie de l’école de Geisha. Et puis, d’autres souvenirs beaucoup plus lointains lui revenaient en tête, des souvenirs de jeunesse, de l’orphelinat, de sa blessure…
Soudain, sans qu’il ne comprenne ni pourquoi ni comment, il se retrouva couvert de riz gohan, le riz gluant traditionnel japonais, ainsi que de poulet et de sauce Teriyaki, sauce de soja particulièrement collante et visqueuse. Il en avait dans les cheveux, sur le visage, les vêtements, et même à l’intérieur de sa veste de kimono. Il était plus alarmé qu’énervé car si son Sensei le voyait rentrer dans cet état, sa punition se rallongerai d’au moins deux bonnes semaines…
Une fois cet instant de panique passé, il entendit la voix d’une jeune fille qui lui reprochait de ne pas regarder où il allait. Il leva les yeux pour observer son interlocutrice toute aussi couverte de nourriture que lui. Elle le dévisagea un instant. Le regard des étrangers faisaient toujours le même trajet : lorsqu’il croisait le regard du jeune homme, ils avaient tous cette expression de stupéfaction, voir de dégoût ou encore de pitié. Mais cette jeune fille n’eut aucune de ces expressions là, au grand désarroi du kendoka.
Elle fronça les sourcils et sembla se concentrer sur l’œil gauche du jeune homme :
- Akyo? Dit-elle avec étonnement.
Il hésita un instant avant de répondre :
- Ou… oui. Comment connaissez-vous mon prénom? Je ne crois pas vous connaître…
Après ces quelques paroles, il s’autorisa à la dévisager à son tour. Elle portait un kimono dépourvu de quelconque ornement, et il n’était pas même en soie. Ses cheveux étaient retenus par une simple queue de cheval, tout comme les siens, et son visage n’était ni attirant, ni repoussant. Et plus il l’observait, plus il avait l’impression de l’avoir déjà vu…